Posidonie

Les herbiers de posidonie : forêts sous-marines aux mille vertus

En dépit de son apparence, la posidonie n’est pas une algue mais une plante aux longues feuilles en forme de ruban qui fleurit dans les océans. Il y a 70 à 100 millions d'années, les plantes terrestres à fleurs ont colonisé le fond de l'océan, conduisant à l'émergence d'un écosystème marin remarquable, offrant des services sans équivalent à l’échelle de la planète. La posidonie a surmonté tous les extrêmes climatologiques depuis le temps des dinosaures. Mais résistera-t-elle à l'Homme moderne ?

La posidonie doit son nom à Poséidon, dieu de la mer dans la mythologie grecque. On l’appelle aussi « herbe de Neptune », nom latin de Poséidon, qui l’avait offerte aux humains. Elle possède des racines, qui lui permettent d’absorber les nutriments dont elle a besoin pour se nourrir et se reproduit essentiellement par clonage, mais aussi grâce aux fruits qu’elle fabrique, semblables à des olives vertes. Si elle pousse très lentement (1 cm par an), elle peut vivre jusqu’à plusieurs milliers d’années. 

Les herbiers de posidonie fournissent un habitat essentiel à diverses espèces marines. Ils sont non seulement un lieu de vie et d'alimentation pour de nombreux poissons, mais aussi une frayère (lieu de ponte) et une nurserie (refuge des juvéniles) importantes. Ses peuplements, qui ressemblent à des prairies, sont en réalité des forêts. L’écosystème de la posidonie rend des services écologiques essentiels, tels que la séquestration durable de carbone, la protection des plages contre l'érosion où elle s'accumule en banquettes, le rôle de frayère, etc. La valeur monétaire à l'hectare de l'écosystème posidonie dépasserait largement celle des récifs coralliens et de la forêt amazonienne.

Nom scientifique

Posidonia oceanica

Répartition / Habitat

Mer Méditerranée. Les herbiers de posidonie poussent sur les fonds marins sablonneux ou rocheux peu profonds (jusqu’à 40 mètres).

Taille

La posidonie est une plante à fleurs qui est formée de longues feuilles (de 20 à 100 cm de long, pour 6 à 10 mm de large).  Son fruit ressemble à une olive verte.

Régime alimentaire

En prélevant les nutriments (azote, phosphore, CO2…) présents dans l’eau ou dans les sédiments et grâce à la lumière du soleil (énergie), la posidonie produit sa propre matière organique (autotrophie) et peut donc croître et se reproduire.

Statut

En danger en Région Provence Alpes Côte d’Azur. C’est aussi une espèce protégée depuis 1988 en France et un habitat d’intérêt communautaire.

Victime des activités humaines

Au cours du 20ème siècle, l’herbier de Posidonie a considérablement régressé, en particulier aux alentours des grands centres industrialo-portuaires dont les aménagements ont été réalisés dans la bande côtière: Barcelone, Marseille, Toulon, Nice, Gênes, Naples, etc. Ce déclin peut atteindre 90%, dans le cas de la baie du Prado à Marseille. Les activités de l’Homme sont clairement en cause !

Aménagements du territoire

D’immenses surfaces d’herbiers sous-marins ont été détruites en raison de l’aménagement des littoraux gagnés sur la mer. La construction de ports, de digues et de plages artificielles s’est souvent faite au détriment des prairies de posidonie. De plus, l’aménagement des bassins versants des fleuves a pour conséquence de réduire les apports de sédiments au milieu marin. Les ouvrages côtiers (ports, épis rocheux) empêchent le transfert latéral des sédiments le long des plages. Il en résulte que l’herbier peut être soit déchaussé par déficit en sédiments (les rhizomes se trouvent au-dessus du sédiment), soit enterré sous une couche de sédiments que les faisceaux de feuilles ne sont pas capables de percer. Dans le premier cas, l’herbier est très vulnérable (ancrages, chalutages, tempêtes). Dans le deuxième cas, il est détruit.Aujourd’hui, heureusement, de tels aménagements sont interdits, grâce notamment à la loi littoral qui s’efforce depuis 1986 de concilier développement et préservation des espaces naturels et de l’équilibre écologique du littoral.

Ancrage des bateaux

Chaque année, des navires de plaisance de plus en plus nombreux et de plus en plus gros jettent l’ancre en Méditerranée, labourant les fonds et ravageant au passage les herbiers de posidonie. Leur surface a diminué de 30% en sept ans dans certaines baies très fréquentées. De même, les amarres constituées d'un corps mort descendu au fond de la mer, attaché à une chaîne partiellement rampante, forment des cercles nus caractéristiques dans les herbiers de posidonie. C’est actuellement la pression la plus importante sur l’herbier de Posidonie dans les pays du nord de la Méditerranée.  En France, la Préfecture Maritime a désormais interdit aux bateaux de plus de 24 mètres de jeter l’ancre dans l’herbier. Il reste maintenant à stopper l’impact des bateaux de moins de 24 mètres, qui représentent plus de 90% des bateaux de plaisance.

Surpêche et pêche illégale

Le chalutage illégal demeure une cause épisodique de la dégradation des herbiers de posidonie, en particulier dans les herbiers profonds. L'utilisation répétée du chalut sur le fond marin, arrache les feuilles et les rhizomes de la posidonie (100 000 à 360 000 pousses par heure), ce qui réduit considérablement la densité et la couverture végétale. Lorsque le chalut passe sur le fond marin, il remet également en suspension les sédiments et modifie la structure du substrat, ce qui augmente la turbidité et les concentrations de nutriments dans la colonne d'eau. La réduction de la couverture végétale et l'altération des sédiments interagissent de manière négative pour maintenir des conditions envasées, peu propices à la posidonie.

Pollution

Pesticides, herbicides, engrais, détergents, pétrole, produits chimiques et eaux usées... Qu’elle provienne de l’industrie, de l’agriculture, des bateaux de plaisance ou des fermes piscicoles, la pollution menace la Posidonie. La charge en éléments nutritifs (azote et phosphore notamment) issus de ces différents rejets contribue, s’il est en trop grande concentration, à la dégradation des prairies sous-marines.

Réchauffement climatique

Si l'olivier est le symbole de la Méditerranée continentale, la Posidonia oceanica caractérise la Méditerranée sous-marine. Elle est endémique de la Grande bleue, ce qui signifie qu’on ne la retrouve nulle part ailleurs. Ce trésor écologique, comparable selon les scientifiques aux récifs coralliens ou aux forêts tropicales, est aujourd’hui menacé. Bien qu’elle soit protégée depuis 1988, le déclin de l’espèce continue de s’accélérer. La surface des herbiers a diminué de 10% sur les 100 dernières années en France et même de 30% en cinq ans dans certaines baies très fréquentées par les grands yachts. Cette destruction d’un écosystème unique et remarquable, si elle n’est pas intentionnelle, demeure directement liée aux activités humaines…

Le réchauffement climatique a un effet sur les forêts sous-marines, qui, bien que résistant à de nombreuses épreuves, notamment la modification du pH de l’eau ou sa pollution, semblent souffrir de l’élévation de la température de l’eau et de la récurrence des événements climatiques extrêmes. Ainsi, d’autres espèces plus résilientes aux changements de température peuvent les supplanter, et l’élévation moyenne du niveau de la mer risque d’être fatale aux herbiers profonds. D’autant que si les ancres, les pollutions et les autres menaces les impactent de façon concomitante, les prairies de Posidonie sont plus vulnérables et moins capables de faire face au changement climatique. 

Que fait le WWF pour la posidonie ?

Le WWF contribue à la protection de la Posidonie dans plusieurs pays méditerranéens (France, Grèce, Tunisie, Turquie), à travers l’initiative Blue Forest. Ce projet a notamment pour vocation de déployer des réglementations adaptées aux navires de plaisance dans les pays qui n’en sont pas encore pourvus et de mettre en place localement des projets pilotes de démonstration pour préserver les herbiers sous-marins.

En France, le WWF s’efforce de promouvoir le mouillage organisé en collaboration avec ses partenaires publics, comme la Préfecture Maritime, la Direction Interrégionale de la Mer, l’Office français de la Biodiversité, l’Agence de l’Eau et les aires marines protégées de Méditerranée française. Il s’agit notamment de favoriser la mise en place de zones de mouillages et d’équipements légers (ZMEL) dans certaines communes littorales, soit des zones dans lesquelles l'ancrage est interdit afin de préserver les habitats sous-marins. Des bouées d'amarrage y sont en revanche installées, pour permettre d'accueillir les bateaux de plaisanciers ou de plongée, sans abîmer les prairies marines. 

Depuis 2020, les navires de plus de 24 mètres de long n’ont plus le droit de jeter l’ancre dans l’herbier de Posidonie. Ils ne peuvent s'amarrer que sur des coffres d’amarrage ou dans des zones bien précises, clairement identifiées, au sein desquelles il n’y a pas de risque pour les posidonies et autres plantes marines. 

Le WWF se mobilise désormais pour limiter l’impact des navires de moins de 24 mètres, qui représentent 95% des plaisanciers en Méditerranée. 

Depuis 2020, les navires de plus de 24 mètres de long n’ont plus le droit de jeter l’ancre dans l’herbier de Posidonie.

Herbiers sous-marins

Nous soutenons également les communes côtières dans la mise en place d’une gestion durable de la bande littorale dite “des 300 mètres” où de nombreuses activités (baignade, paddle, planche à voile, kitesurf, bodyboard, kayak, bateaux voile et à moteurs,..) cohabitent avec des écosystèmes marins sensibles, tels que l’herbier de Posidonie. L’identification des enjeux permet de mieux concilier les usages et de faciliter l’adoption de mesures, telles que l’interdiction de la navigation à moteur dans les zones de baignade, l’interdiction d’ancrage dans les zones d’herbier ou encore la mise en place de systèmes de moindre impacts sous les bouées jaunes qui matérialisent la zone des “300 mètres”.

La surface des herbiers a diminué de 10% sur les 100 dernières années en France et même de 30% en cinq ans dans certaines baies très fréquentées par les grands yachts. 

Nous menons aussi des actions de sensibilisation pour faire connaître les fonctions essentielles de la Posidonie et inciter à la protéger. En effet, ces herbiers marins sont méconnus du grand public qui, dès lors qu’il prendra conscience du rôle indispensable de cet écosystème, sera plus enclin à le préserver. En parallèle, nous nous efforçons de mobiliser les entreprises de la plaisance, les constructeurs, les loueurs, les équipementiers et les plaisanciers, car leur activité est intimement liée aux impacts de l’ancrage sur la posidonie.

Enfin, le WWF soutient DONIA®, une application communautaire de navigation et d’aide à l’ancrage en mer sans impact, développée par Andromède Océanologie et l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse. Gratuitement téléchargeable sur les stores Android et Apple, elle permet à tout plaisancier, pêcheur, plongeur ou capitaine de yacht de se positionner par rapport à la nature des fonds et d’ancrer en dehors des écosystèmes sensibles (herbiers sous-marins, récifs coralligènes), dans le respect de la loi.

D’ici 2030, le WWF France appelle à atteindre une  protection totale de la Posidonie  (vivante et morte). Le WWF-France fait partie de l’Alliance Posidonie, un collectif d’acteurs des secteurs public et privé qui travaillent depuis maintenant de nombreuses années à préserver ce bien commun qu'est la Posidonie.

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