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26. janvier 2016 — Communiqué de presse

La loi sur la biodiversité votée au Sénat : quelles avancées ?

La loi sur la biodiversité, en lecture au Sénat depuis mardi 19 janvier, vient d’être solennellement votée. Deuxième grande loi de protection de la nature en France quarante ans après celle de 1976, elle comprend de très nombreuses dispositions visant à « reconquérir », et non simplement préserver, la biodiversité.

Parc national de Virunga (République démocratique du Congo)

 

Pascal Canfin, directeur du WWF France, revient sur l’évolution de la loi, lors de son passage à l’Assemblée nationale en mars puis au Sénat ces derniers jours, et plus particulièrement sur l’Outre-mer et les sujets marins sur lesquels l’association s’est mobilisée.



« Avec cette loi nous cherchons à reconquérir notre capital naturel qui est la base de notre économie car il n’y a pas d’un côté les enjeux de la biodiversité et d’un autre les enjeux économiques. Comme aime à le dire Sharan Burrow, Secrétaire Générale de la Confédération syndicale internationale, il n’y a pas d’emplois sur une planète morte. »

La reconnaissance du préjudice écologique

 

« L’introduction du préjudice écologique dans le code civil est  une véritable révolution juridique et philosophique. Comme c’est déjà le cas aux Etats-Unis et au Mexique, il sera bientôt possible en France de reconnaitre une responsabilité pour les dommages causés à l’environnement lui-même. Cette reconnaissance envoie un signal fort aux entreprises. Nous espérons qu’elle sonnera la fin de l’impunité pour les pollueurs. »

L’interdiction du chalutage profond supprimée

 

La commission du Sénat avait introduit l’interdiction du chalutage profond, la profondeur à partir de laquelle cette interdiction s’appliquait étant renvoyée à un décret. Cinq sénateurs de droite et tout le groupe socialiste ont demandé et obtenu la suppression de cette disposition.



« Tout le monde reconnait l’impact désastreux du chalutage profond et personne ne pourrait défendre un tel massacre s’il avait lieu en surface à la vue de tous. C’est aussi le constat qu’a fait la ministre de l’Ecologie. La France aurait pu faire preuve d’exemplarité et d’ambition. Le Sénat a préféré se faire le porte-parole du lobby de la pêche industrielle qui défend, pour le principe, une pratique du passé. Nous continuerons à mener la bataille à l’Assemblée. »

La lutte contre la biopiraterie : une meilleure prise en compte des communautés locales

Le projet de loi initial prévoyait le consentement des communautés pour l’utilisation de leurs savoirs traditionnels mais les ignorait totalement pour l’accès aux ressources génétiques. Le dispositif a été considérablement amélioré au Sénat. Les communautés pourront dorénavant être consultées à travers un comité territorial des parties prenantes chargé de conseiller l’autorité administrative, elles seront informées lorsqu’une autorisation de prélèvement de ressources génétiques sera donnée et les chercheurs auront l’obligation de rendre compte aux communautés des connaissances acquises.



« Le WWF qui est implanté en Guyane et en Nouvelle-Calédonie est particulièrement actif sur ce sujet. Nous nous félicitons que la France se dote d’un outil pour lutter contre la biopiraterie et mieux prendre en compte des communautés locales en transposant dans son droit les principes du Protocole de Nagoya. Il est très important que ces dispositions restent. Cette loi peut permettre une meilleure articulation entre la République et les communautés locales, elle peut être un outil de reconnaissance. Sans ces dispositions, elle sera au contraire perçue par les communautés comme un outil de dépossession. »

Une meilleure représentation de l’Outre-mer dans la gouvernance de la biodiversité

« Alors que 80% de la biodiversité française est concentré dans les territoires d’Outre-mer, nous nous réjouissons de voir que  l’Outre-mer est désormais bien représenté dans les différentes instances de gouvernance de la biodiversité et notamment au conseil d’administration de l’Agence Française pour la Biodiversité. »

Le système anticollision entre navires et cétacés dans les sanctuaires Pelagos et Agoa limité à une expérimentation

La collision avec un navire est une des principales causes de mortalité non naturelles pour les grands cétacés. Le gouvernement et le Sénat ont reconnu ce problème, c’est un premier pas. Mais la mesure proposée, qui ne prévoit qu’une expérimentation sur les navires de l’Etat, ne va pas assez loin. Un système anticollision existe et est déjà expérimenté. A l’instar du système Coyote d’avertisseur de radar, il ne fonctionne que si un grand nombre de navires est équipé ; il faut donc le généraliser à tout le trafic maritime.



« C’est un engagement de la Conférence Environnementale 2013 que le gouvernement doit tenir lors du passage à l’Assemblée. »