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24. juin 2022

A Madagascar, les efforts des pêcheurs paient

Cette année, 376 cartes professionnelles ont déjà été distribuées aux pêcheurs travaillant aux abords du parc national de Kirindy Mite. Une première, dans cette partie du pays, qui vient récompenser leurs bonnes pratiques.

Une pêche pas assez sélective

La senne de plage à petites mailles endommage l’environnement des zones avoisinantes en capturant de nombreuses espèces non ciblées, et engendre donc un énorme gâchis.

Traversée par le tropique du Capricorne, la  Grande Île mêle des influences africaines, indiennes et extrême-orientales qui composent des paysages somptueux, abritant une diversité biologique exceptionnelle, reconnue mondialement. La pêche est l’une des principales sources de revenus pour les populations locales.

Mais sous la pression démographique, cette activité s’intensifie, faisant place à des techniques de moins en moins vertueuses qui contribuent à la surexploitation des ressources halieutiques et à la destruction des habitats. Conjuguée aux effets du changement climatique, cette surpêche met en péril la sécurité alimentaire, et à plus court terme, l’avenir des pêcheurs et les moyens de subsistance des communautés locales.

Beaucoup ont recours à la senne de plage à petites mailles, bien que cette technique soit désormais interdite dans le pays. Tendu dans une passe du récif, ce type de filet attrape tous les poissons cherchant à s’y frayer un passage, ravageant tout ce qui se trouve sur son chemin. Non seulement cette pratique endommage l’environnement des zones avoisinantes mais en capturant de nombreuses espèces non ciblées, elle engendre un énorme gâchis. A la fin de la journée, les pêcheurs font le tri, enterrant sous le sable ou rejetant à la mer les poissons, blessés ou morts, qu’ils ne commercialiseront pas.

Vers une pêche plus durable

Présent depuis plus d’un demi-siècle à Madagascar, le WWF s’efforce de concilier conservation et bénéfices socio-économiques via une gestion communautaire. 

Nous mettons tout en œuvre pour que les populations riveraines soient le plus impliquées possible dans la préservation de leur terroir. Concrètement, nous les accompagnons en les incitant à se structurer en COBA, Communautés locales de base, afin de se voir confier en propre par l’Etat la gestion de leurs ressources naturelles.

Par ailleurs, conscients de l’enjeu crucial que représente la pêche pour les populations locales, nous instaurons avec elles des filières « poissons » et « crabes » durables et génératrices de revenus. Depuis le début du projet, trois COBA ont déjà été créées, la quatrième est en cours de contractualisation. 

En avril 2019, le premier projet d'amélioration de la pêche aux poulpes (Fishery Improvement Project) a été lancé à Madagascar, dans la région d’Atsimo Andrefana. Des initiatives bien concrètes pour améliorer les pratiques et la gestion d‘une filière afin que cette dernière réponde aux normes établies par la certification MSC, le label aujourd’hui le plus exigeant en matière de pêche responsable.

Un permis de pêche officiel !

En janvier 2020, suite aux opérations de sensibilisation menées par l’association communautaire locale Fikambanasoa dans le village d’Ambalahonko, un petit groupe de pêcheurs décide de renoncer à l’utilisation de la senne de plage. Petit à petit, l’initiative essaime dans la région. Sept autres villages s’engagent à leur tour à ne plus avoir recours à cette pratique destructrice. Quelques mois plus tard, avec l’appui du WWF, la Direction Régionale de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche (DRAEP), vient récompenser leurs efforts en leur octroyant des cartes professionnelles. Autrement dit, elle leur délivre un permis de pêche officiel qui fait de son propriétaire un pêcheur citoyen, militant pour le respect des milieux aquatiques et la pratique d’une pêche plus responsable. 

Pour les pêcheurs, cette carte est le moyen de valoriser leur profession et de gratifier leur engagement. Côté pouvoirs publics, elle facilite la collecte de données, améliorant le suivi de l’état des ressources et favorisant le recensement des pêcheurs. Un point crucial car sur le littoral au sud de Toliara, le nombre de pêcheurs augmente exponentiellement à cause des migrants, à la recherche de ressources encore exploitables. Par conséquent, la pression sur les ressources marines s'accroît. Plus que jamais, la réglementation de cette pêche clandestine est un enjeu. 

Cette année, 376 cartes professionnelles ont été distribuées aux pêcheurs travaillant aux abords du parc national de Kirindy Mite, l’une des cinq Réserves de Biosphère de l’Unesco à Madagascar. C’est la première fois que les habitants de la région Menabe bénéficient de l’initiative, preuve que le projet prend de l’ampleur, convertissant de plus en plus de pêcheurs à de meilleures pratiques.