Svalbard (Norvège)
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05. octobre 2017

Bientôt une nouvelle Aire Marine Protégée en Arctique ?

Après 30 ans de tergiversations, le gouvernement du Canada, le gouvernement du Nunavut et l’Association inuite du Qikiqtani (AIQ) viennent de se mettre d’accord sur les limites définitives de l’aire marine nationale de conservation de Tallurutiup Imanga, dans le détroit de Lancaster.

Un écosystème unique

C’est un lieu d’une beauté naturelle indescriptible. C’est aussi l’habitat des trois quarts de la population mondiale de narvals, de nombreux ours polaires, phoques, morses et bélugas, et un refuge pour les millions d’oiseaux de mer qui s’y posent chaque été pour élever leurs petits. Dans le détroit de Lancaster, Tallurutiup Tariunga, comme le nomment les Inuits qui le peuplent depuis des millénaires, est un écosystème arctique unique.

Pourtant, le réchauffement y est deux fois plus rapide que la moyenne mondiale, ce qui entraîne la fonte de la banquise, fondement de la vie arctique. Le recul des glaces ouvre la région à des projets de développement, particulièrement dans les secteurs miniers et du pétrole et gaz, qui s’accompagneront d’une intensification de la navigation. Tous ces bouleversements vont impacter la faune, la flore et les communautés riveraines.

Renard polaire (Alopex lagopus), parc national du Groenland

Renard polaire (Alopex lagopus), parc national du Groenland

Promouvoir les énergies renouvelables

Depuis les années 1980, le WWF Canada travaille aux côtés des communautés locales pour protéger la région face aux menaces de développement extracôtier de gaz et de pétrole. Source d’énergie primaire pour les communautés arctiques, avec ses coûts logistiques et financiers très élevés, le diesel empêche la pleine autonomie des communautés nordiques et présente de nombreux risques pour l’environnement.

C’est pourquoi le WWF Canada promeut l’utilisation des énergies renouvelables à faible impact, telles que l’énergie éolienne, solaire et l’hydroélectricité. Début 2016, le WWF Canada conteste en justice la validité de 30 permis d’exploration appartenant à Shell dans la zone. Au même moment, le groupe décide de renoncer volontairement à ces permis, ouvrant la voie à la création d’une aire marine nationale de conservation AMNC pour protéger cet écosystème unique.

Au-delà des espérances

Le 14 août dernier, Parcs Canada et le gouvernement fédéral ont annoncé que les frontières de l’aire marine nationale de conservation de Tallurutiup Imanga seraient finalement plus vastes que prévu, suivant ainsi les recommandations de l’Association des Inuits de Qikiqtani. Ensemble, l’AMNC proposée dans la région de Tallurutiup Imanga, le parc national Sirmilik, le Refuge d’oiseaux migrateurs de l’île Prince Leopold et la Réserve nationale de faune de Nirjutiqavvik totaliseront une surface de plus de 131 000 km², soit plus de deux fois la taille de la plus grande aire protégée du Canada, le Refuge d’oiseaux migrateurs du golfe de la Reine-Maud.

Pour l’instant, il ne s’agit que d’un consensus sur les frontières de l’aire marine entre les différents acteurs concernés mais si une entente se conclue sur les répercussions et avantages pour les Inuits, l’AMNC proposée à Tallurutiup Imanga fera plus que doubler la superficie des eaux maritimes protégées du Canada, et contribuera à hauteur de 2% aux engagements pris par le gouvernement d’augmenter le pourcentage de zones côtières et marines protégées du pays à 5 %. Et surtout, au-delà de préserver la biodiversité unique de la région, cette aire marine permettra d’établir une relation de coopération entre le Canada et les Inuits afin de guider les activités actuelles et futures dans le détroit de Lancaster au profit des espèces marines, des Nunavummiut et des Canadiens !